BULLETINS JURIDIQUES

De l’existence des sociétés par actions

Questions de vie et de mort 

Le droit québécois prévoit la création de sociétés par actions à l’article 299 du Code civil du Québec

«[299] Les personnes morales sont constituées suivant les formes juridiques prévues par la loi, et parfois directement par la loi.

Le Code civil du Québec leur attribue la personnalité juridique à l’article 298 et stipule à l’article 301 que les personnes morales (dont les sociétés par actions) ont la pleine jouissance des droits civils.

Au Québec, la majorité des sociétés par actions (compagnies) ont été créées par la Loi sur les compagnies remplacée en 2011 par la Loi sur les sociétés par actions (L.R.Q., chapitre S-31.1) et en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, L.R.C. 1985, c. C-44. Le gouvernement du Québec et celui du Canada ont tous deux la compétence pour adopter des lois prévoyant la constitution de sociétés par actions.

Ce préambule sert à illustrer le fait que les sociétés par actions sont une créature de l’État, elles naissent parce que le législateur le veut et l’a prévu. Logiquement donc, les mêmes lois prévoyant leur création ou encore d’autres lois devront prévoir la fin de leur existence.

Le bébé du docteur Frankestein 

Les personnes physiques sont vivantes ou mortes. Les sociétés par actions, une fois créées, ont une existence en principe perpétuelle, car comment une créature de l’État peut-elle mourir autrement qu’aux mains de son créateur? Nous verrons plus loin qu’avant de faire cesser l’existence d’une société par actions, plusieurs formalités doivent être remplies.

Mais avant de songer à sa fin, voyons ce qui arrive après la naissance. Une fois le bébé en vie, ou le monstre (c’est selon), il aura besoin de soins et d’attentions. Cela se traduit par la tenue de registres juridiques (le livre des procès-verbaux), de registres comptables divers, de déclarations annuelles, de déclarations aux fins des taxes et impôts, de la conservation de pièces justificatives, etc. Bref, passablement de paperasse, c’est le lot de notre état de droit bureaucratique.

Il peut arriver cependant (et en fait il arrive fréquemment) que les personnes concernées (administrateurs, dirigeants, actionnaires ou fondés de pouvoir) pour diverses raisons (négligence, décès des personnes physiques, insolvabilité, désintérêt, inactivité, etc.) ne remplissent pas les obligations corporatives prévues par différentes lois. Il s’ensuit diverses conséquences bien sûr. Nous allons en examiner quelques-unes.

Radiation d'office 

Pour les diverses raisons évoquées ci-dessus, les obligations auxquelles sont assujetties les sociétés par actions, notamment en vertu de la Loi sur la Publicité légale des entreprises L.R.Q., chapitre P-44.1, ne sont parfois pas accomplies. Ainsi, si la société par actions (Québec) est en défaut de déposer deux déclarations annuelles, le registraire des entreprises a le pouvoir de dissoudre la société.  La radiation d’office entraîne la dissolution de la société. (pour les sociétés fédérales le même pouvoir appartient au Directeur des sociétés pour les obligations de même nature prévues à la Loi canadienne sur les sociétés par actions).

Pour les diverses raisons évoquées ci-dessus, les obligations auxquelles sont assujetties les sociétés par actions, notamment en vertu de la Loi sur la Publicité légale des entreprises L.R.Q., chapitre P-44.1, ne sont parfois pas accomplies. Ainsi, si la société par actions (Québec) est en défaut de déposer deux déclarations annuelles, le registraire des entreprises a le pouvoir de dissoudre la société.  La radiation d’office entraîne la dissolution de la société. (pour les sociétés fédérales le même pouvoir appartient au Directeur des sociétés pour les obligations de même nature prévues à la Loi canadienne sur les sociétés par actions).

Conséquences de la dissolution

Une société par actions dissoute n’existe plus et elle n’a pas d’administrateurs non plus. Elle ne pourrait par exemple être poursuivie par ses créanciers. Cependant, les administrateurs « de facto » qui continuent à faire agir la société deviennent personnellement responsables des actes posés. Certaines responsabilités statutaires peuvent également subsister comme celles découlant des lois fiscales.

Si la société est dissoute, il est possible d’y remédier par le biais d’une révocation de la radiation. Il reste que d’importants problèmes peuvent découler de la radiation d’office. Un exemple, cela pourrait retarder la conclusion d’un contrat. Techniquement, le ministre du Revenu a la saisine des biens et peut vendre ces biens.

Cela dit, les administrateurs d’une société par actions inopérante peuvent être tentés de laisser les choses aller comme on balayerait une poussière sous le tapis en pensant qu’il n’arrivera rien de bien spécial. Ce n’est pas le cas ! (Les sociétés qui ont fait faillite en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, L.R.C. 1985, c. B-3 sont dans une situation distincte assez floue au plan juridique – techniquement, elles existent toujours, mais elles ne peuvent agir et ne sont plus en pratique tenue de produire des rapports et déclarations.)

Conséquences fiscales 

Toute personne qui liquide les biens d’une société sans obtenir le certificat de décharge prévu par les lois fiscales s’expose à ce que sa responsabilité personnelle soit retenue jusqu’à concurrence de la valeur des biens distribués.

Par ailleurs, la Loi de l’impôt fédérale et la Loi sur les impôts du Québec prévoient que le ministre peut demander à toute personne la production d’une déclaration de revenus. Cette faculté existe que la société soit active ou non, qu’elle soit dissoute administrativement ou non (radiée d’office).

Par le passé, il arrivait que les ministères fassent preuve d’indulgence et cessent de réclamer la production de déclarations de revenu et d’états financiers à des sociétés inopérantes. La politique actuelle est de réclamer l’accomplissement de ces formalités tant et aussi longtemps que la société n’aura pas été liquidée et dissoute en bonne et due forme. Bref, les sociétés seront dans l’obligation de produire des déclarations jusqu’à ce qu’elles soient dissoutes et liquidées suivant la loi. Si lesdites déclarations ne sont pas produites, les personnes à qui les demandes ont été faites (administrateurs, dirigeants, actionnaires ou « ex ») sont passibles de pénalités sévères. Afin de convaincre les administrateurs négligents, le fisc émet aussi des cotisations arbitraires nécessitant une réaction.

Formalités pour liquider et dissoudre

Dans le cas des sociétés radiées d’office, il faut d’abord, avant de pouvoir les dissoudre et les liquider conformément à la loi, les raviver en présentant une demande de révocation (au fédéral une demande de reconstitution). Ensuite, il faut se mettre en règle auprès du registraire des entreprises ou auprès du Directeur des sociétés. Cela nécessite la production des déclarations annuelles manquantes.

Dépendamment du nombre d’années manquantes, les frais seront peuvent être plus ou moins élevés allant de quelques centaines à quelques milliers de dollars.

Une fois que la société a repris son existence, d’autres formalités doivent être accomplies pour la liquider et la dissoudre en bonne et due forme. À noter que l’on ne peut liquider et dissoudre une société qui a toujours des dettes à moins d’obtenir l’aval des créanciers ou d’assumer ces dettes. A défaut, la faillite demeurera la seule façon de terminer les activités de l’entreprise endettée.

Autres incidences fiscales

Lorsqu’une société par actions obtient, par hypothèse avant d’être dissoute et liquidée, une remise de dette d’un ou de plusieurs créanciers, la loi prévoit une sorte de revenu présumé devant être appliqué sur les soldes de pertes à reporter s’il y en a, sur les FNACC (fractions non amorties du coût en capital des biens amortissables) et sur le PBR (prix de base rajusté des autres immobilisations).

Conclusion

Il est relativement facile de créer une société par actions. Son existence entraîne des frais d’entretien et il peut être moins facile et plus coûteux que l’on ne le croit généralement pour mettre fin à son existence.
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